lundi, juin 22, 2020

La Vérité

Le 27 mars dernier, le Secrétaire général des Nations-Unies déclarait solennellement "Notre ennemi commun est la COVID-19, mais notre ennemi est aussi une ’infodémie’ de désinformation". 

Il est vrai que l'épidémie de Covid a suscité un déluge de commentaires, de rumeurs, de colères et de soupçons, venant des sources les plus variées et parfois... déconcertantes. Pour les autorités du monde entier, la nécessité de faire comprendre la situation, d'empêcher la panique, de diffuser de bonnes instructions sanitaires de manière non ambigüe était, au sens strict, une question de vie ou de mort.

Pendant cette crise, les médias, les entreprises d'internet - moteurs de recherche et réseaux sociaux -, les gouvernements et les autorités sanitaires se sont mobilisés pour que cette "infodémie" ne dégénère pas. 

Et l'un dans l'autre, il semble que nous ayons plus ou moins compris, ou en tous cas eu les moyens de comprendre, que ce virus n'était pas une arme bactériologique, qu'il ne se soignait pas en buvant du thé, que les gestes barrières étaient importants et quelques autres vérités essentielles...

Nul soulagement pour autant. Nous avons assisté à des choses inquiétantes, nous savons qu'elles auraient pu être pires, nous avons bricolé, dans l'urgence, des règles parfois un peu acrobatiques. Quelques sites, comptes ou messages ont été censurés un peu rapidement, quelques dérapages ont été observés... Nous pouvons faire mieux.

je voudrais revenir aujourd'hui sur ce concept d'infodémie et sur cette exigence de "protéger la vérité". Les deux prennent place dans une longue histoire de dénonciations et d'appels à mobilisation contre les "Fake news", les "infox", la "désinformation", la "misinformation", "l'ère de la post-vérité "(expression née autour de 2004 et consacrée par le dictionnaire d'Oxford en 2016), la "Thruthiness" (jeu de mot lancé par Stephen Colbert en 2005) et tant d'autres expressions de préoccupation des autorités, des intellectuels, des journalistes et de nombreux citoyens face à cette parole ingérable et bouillonnante des réseaux sociaux. 

dimanche, avril 05, 2020

Coronavirus : nous avons besoin de la presse


Il y aura fort à dire sur la manière dont l'épidémie de Covid-19 nous conduit à réagir et à nous réorganiser, pour le meilleur et pour le pire, en nous appuyant sur les acteurs et des ressources de la transformation numérique. D'autres le soulignent dans d'autres colonnes. Nous nous interrogerons un jour, le plus tôt sera le mieux, sur les modèles implicites qui auront guidé les réactions des uns et des autres, et surtout sur les libertés et les sécurités qui auront été respectées ou sacrifiées. Ce n'est pas encore le moment, mais chacun ferait bien s'y songer d'ores et déjà.

Je voudrais juste souligner aujourd'hui combien cette crise mondiale est aussi un moment de mutation radicale du rôle des réseaux sociaux dans nos quotidiens. 

D'une part, et cela me semble trop peu souligné, les réseaux sociaux, les messageries instantanées, les mails, les newsletter ont joué un rôle déterminant dans la manière dont la société s'est appropriée le message des autorités politiques et sanitaires, s'est réorganisée en un temps record, a bâti en un instant des solidarités locales, des canaux d'information, d'éducation, et a fait émerger une culture du confinement soutenable.
A n'en pas douter, le numérique est un puissant facteur de résilience, d'intelligence collective et de solidarité.

Mais en même temps il faut bien le reconnaître, les réseaux sont aussi le terreau fertile des théories complotistes, des suggestions farfelues, des rumeurs de tous ordres. Ce bruit est largement spontané mais résulte aussi, il faut en être conscient, de manipulations orchestrées par certains pays, certains groupes politiques et sans doute par certains intérêts économiques.
Difficile de s'informer quand les télévisions passent en boucle les images sensationnelles, inquiétantes, souvent anecdotiques, et quand les réseaux deviennent un maëlstrom ininterrompu où le meilleur côtoie le pire. Difficile de comprendre l'événement en marche à partir de millions d'expériences subjectives. Fabrice à Waterloo fait de la bonne littérature, mais pas de la bonne Histoire...

Plus que jamais, nous avons besoin d'une presse libre, sereine, capable de prendre du recul, de proposer des synthèses, d'expliquer et de nourrir le débat public.