mardi, avril 30, 2013

Assises de l'entrepreneuriat : une nouvelle donne ?

J'étais ce lundi après-midi au séminaire de conclusion des Assises de l'entrepreneuriat.
J'en suis sorti, comme la plupart des participants : conquis.
Et même, au risque de l'emphase, avec le sentiment d'avoir assisté à un moment essentiel de l'histoire de l'entrepreneuriat dans notre pays, et en particulier de l'histoire de la gauche et de l'entrepreneuriat.
Prenez le temps, si vous le souhaitez, d'écouter le discours du Président de la République : vous sentirez rapidement immédiatement le climat en question. Et pour ceux qui connaissent les arcanes du PS, vous sentirez aussi à quel point nous avons pu avoir le sentiment de voir naître un nouveau récit de la gauche sur les entreprises, ou à tout le moins la victoire d'une composante de la gauche qui avait fort peiné à se faire entendre jusqu'à présent...

Le détail des mesures est précisé sur le site du Ministère du redressement productif. Pour ceux, comme moi, qui avaient manifesté leur inquiétude face à certaines dispositions de la loi de finances 2013, et qui avaient participé à certaines des discussions à Bercy, il y eut d'abord des annonces fortes et très encourageantes :

- la simplification drastique, et l'allègement considérable, de la taxation des plus-values. Il faut bien comprendre l'importance de cette question. Au nom de la décision de taxer les revenus du capital à l'égal des revenus du travail, le ministère du budget avait décidé de taxer également les plus-values sur le capital constitué ou investi par les entrepreneurs, alors même que de nombreuses voix, et pas seulement celles des pigeons, affirmaient que la constitution d'un capital n'avait rien à voir avec la rente issue du placement d'un capital. En corrigeant le tir, la loi de finances avait ensuite créé de nombreuses catégories, complexifiant encore un système déjà foisonnant, qui comptait désormais plus de 40 taux d'imposition différents. A dater de cette année, les choses vont devenir très simple : la plus-value sera taxée comme les revenus du travail en cas de détention inférieure à deux ans. Après deux ans, elle bénéficiera d'un abattement de 50 %. Après 8 ans, d'un abattement de 65 %. En cas de départ à la retraite ou de création d'entreprise, de 85 %. Et ce, pour les entrepreneurs, leurs financiers  leurs salariés, etc.
- au delà de cette mesure très attendue, quelques autres avancées majeures, en particulier la suppression de l'indicateur "040" du fichier de la Banque de France, qui pouvait pénaliser pendant de longues années l'entrepreneur ayant connu une faillite ;
- différentes dispositions favorisant l'investissement dans les jeunes entreprises non cotées, comme la réforme du Plan d'épargne en actions ou une avancée vers la facilitation du Crowdfunding.

lundi, avril 15, 2013

"L'innovation est une dissidence"

Même si je m'y suis fait rare dans la dernière ligne droite, Etalab oblige, j'ai eu le plaisir et la chance de participer aux travaux de la commission Beylat-Tambourin sur notre système d'aide à l'innovation at au transfert de technologie.

Réunis dans un groupe de travail varié et passionnant, mêlant chercheurs, entrepreneurs, VC, administrations, pôles de compétitivités et enseignants, nous avons travaillé près de huit mois autour d'une seule question : comment améliorer la puissance d'innovation dans notre pays, et comment aider le succès de ces innovations.

Le rapport complet est téléchargeable ici, et je vous le recommande. Vous y trouverez notamment beaucoup de chiffres très éloquents. Je ne vais pas le résumer, il débute par une excellente synthèse.
Je voudrais juste commenter ici ce qui me semble avoir été repéré très vite comme le coeur de la question, et qui a guidé l'ensemble des recommandations.

L'innovation n'est pas la simple suite logique et naturelle de la recherche. Elle ne se planifie pas. Elle ne se quantifie pas avec des critères aussi simples que les budgets de R&D ou le nombre de brevets déposés. L'innovation, cela commence avec le geste d'un créateur qui propose quelque chose de neuf. Cela commence toujours avec l'aventure d'une petite équipe qui plonge dans l'inconnu pour y tracer de nouvelles voies. Et ça ne devient une innovation que lorsque la société l'accepte, lorsque cela trouve sa place. C'est un progrès, et ce sont les utilisateurs qui décident ce qui est progrès, et ce sont leurs pratiques qui transforment la proposition en ce qui peut être qualifié de progrès. L'innovation, c'est donc presque toujours un imprévu, qui sanctionne un risque.

Ce n'est pas pour autant quelque chose d'imprévisible, sur lequel le politique n'aurait aucune prise. Tous les grands territoires d'innovation (Etats-Unis, Israël, Europe du Nord, Corée, Chine...) ont une grande politique d'innovation. Il faut une ambitieuse politique de recherche, il faut un transfert efficace des résultats de cette recherche, il faut un intense effort de recherche-développement, il faut que l'Etat et les grands groupes apprennent à faire des achats innovants, et il faut de grandes générations d'entrepreneurs. Mais il faut une aussi société accueillante à ces entrepreneurs : des capitaux, des clients, mais surtout une culture, une acceptation sociale. Il faut, aussi, une société tolérante à l'échec. Aucun de ces ingrédients ne peut manquer, faute de quoi, un pays ne peut devenir, ou rester, un grand pays innovant.