mardi, avril 17, 2012

Peut-on être contre les big data ?

Mon ami Daniel Kaplan, vient de publier dans Internet Actu un article au titre provocateur : Big Data, grande illusion ?

L'article présente les thèses d'Alan Mitchell, le directeur de la stratégie du cabinet Ctrl+shift. Selon lui, "les Big Data auraient presque un côté contre-révolutionnaire : le chant du cygne d’une informatique productiviste, centralisatrice, centrée sur les grandes organisations." L'effort consenti - notamment en R&D - pour développer cette informatique et ses applications aurait été mieux employé à développer le pouvoir de création des individus, et à les aider à produire eux-mêmes les arbitrages qui leurs sont proposés par cette informatique massive. Daniel Kaplan lui-même reconnaît, à la fin de l'article, que le propos est peut-être un peu fort et qu'il est peu adapté, par exemple, aux les sciences dures.

Je m'arrête sur cet article parce qu'on me pose de plus en plus de questions sur ce phénomène big data dont j'ai parlé très tôt. Et parce que cette position, même si je puis la partager en partie, mélange la description du réel, l'analyse économique et la prise de position politique d'une manière qui mérite qu'on la prenne au sérieux, mais aussi qu'on lui réponde.

Ce que veut dénoncer Mitchell, c'est une inflexion des stratégies de R&D, des politiques de recherche, voire de certaines stratégies de résolution de problèmes, qui privilégie une approche massive, centralisée, consommatrice de capital. Avec une véritable cohérence idéologique, il propose d'encourager au contraire la production locale de données, de savoirs et d'applications, dans la lignée d'autres combats du numérique comme celui du mouvement du logiciel libre contre les grands éditeurs.
Pourquoi pas ? Il y a bien des circonstances où je souscrirais volontiers à cette analyse. D'un point de vue politique, la concentration des données, de la puissance de traitement et de la capacité d'interprétation est préoccupante.

Mais de là à contester l'existence même, l'intérêt et la puissance du phénomène big data, il y a un pas que l'on ne peut franchir.