Outre une importante réforme du Crédit d'impôt recherche, le projet entend également "raboter" le statut des jeunes entreprises innovantes, mis en place en 2004.
Concrètement, une jeune entreprise innovante (c'est-à-dire une entreprise de moins de 250 salariés, de moins de 8 ans, indépendante capitalistiquement et affectant plus de 15 % de ses dépenses à la R&D) se voyait proposer un allègement des charges patronales sur les salariés impliqués dans l'activité de recherche et sur les mandataires sociaux et une exemption des plus-value pour les investisseurs (facilitant ainsi la levée de fonds), aides pouvant s'ajouter au Crédit d'impôt recherche.
Le projet de loi de finances pour 2008 prévoit :
- de plafonner ces aides fiscales à 100 000 euros,
- de les limiter aux salaires inférieurs à quatre fois le SMIC (si vous êtes innovants, vous n'allez pas en plus vous débaucher un cador dans un grand groupe, quand même !)
- et de réduire ce dispositif dans le temps, en commençant à le rendre dégressif au bout de quatre ans.
J'ai déjà de lourdes interrogations sur la réforme du Crédit d'impôts recherche... Mais cette réforme des JEI a vraiment quelque chose d'absurde.
D'abord parce que c'est sans doute aujourd'hui l'aide qui produit le plus d'emplois immédiats. Les Jeunes entreprises innovantes sont des start-up : elles dépensent tout leur capital, et malheureusement parfois plus encore, dans des projets d'innovations. Elles n'ont pas de salaires mirobolants et ne distribuent pas de dividendes. C'est la seule aide dont on peut raisonnablement penser qu'elle est immédiatement convertie en emplois, dans une économie où par ailleurs, les PME représentent près de 60 % des créations d'emplois, comme le rappelait un récent rapport de l'Oséo.
Ensuite, parce que ce sont ces entreprises qui portent toutes les chances de notre économie de relever les nouveaux défis qui se présentent dans le numérique, les biotechnologie, l'automobile, l'énergie et tant de secteurs travaillés par la révolution industrielle en cours.
Le simple fait d'envisager cette mesure souligne certains des pires maux de notre économie :
- l'absence de stabilité et de prévisibilité des politiques publiques. Voilà une mesure qui a six ans à peine, c'est-à-dire que les premiers bénéficiaires n'ont pas encore fini le cycle, une mesure qui commence à porter ses fruits, qui commence à entrer dans les esprits des entrepreneurs et des investisseurs. Eh bien on la modifie déjà, de même que le CIR. Comment voulez-vous que les gens s'engagent, comment voulez-vous que les entreprises étrangères s'implantent en France quand les dispositifs changent tout le temps ?
- La mécompréhension des mécanismes de l'innovation. Comme vient de le souligner le blogueur Bluetouff avec toute sa verve, il y a quelque chose d'absurde à apprendre, la même semaine que l'on va supprimer 50 millions d'euros aux jeunes entreprises innovantes (affectant ainsi plus de 10 000 emplois) et que l'on va donner 75 millions d'euros aux jeunes pour essayer de leur faire acheter de la musique selon des modalités dont ils ne veulent pas.
- Le manque de confiance envers les PME. Il serait excessif de prétendre que les PME ne sont pas aidées dans ce pays. On les soutient, certes. Mais est-ce qu'on croit en elles ? Est-ce qu'on pense vraiment qu'elles sont notre plus grande chance de voir surgir les champions industriels de demain ? Ou est-ce que l'on fait avec elle une sorte de traitement social du chômage, puisque ce sont elles qui créent les emplois ?
Il n'empêche, ce soir, je trouve que la coupe est pleine. Les TPE PME ont une fiscalité sur les bénéfices supérieure aux grands groupes, elles ne bénéficient pas des avantages fiscaux de la "niche Copé" ni de tant d'autres aides sectorielles, elles doivent forcer la défiance des banques et des services achat des grands groupes et des acheteurs publics. Et c'est sur elles que l'on va gratter 50 millions d'euros pour sauver la France ?
Un rapport parlementaire de 2005 confessait que l'on ne sait plus mesurer simplement le montant total des aides accordées aux entreprises. La "niche Copé", c'est 22 milliards. Les aides à l'automobile l'an dernier, 6 milliards. Il y en a des dizaines d'autres.
Est-ce vraiment en alourdissant le sort de très jeunes entreprises, hautement technologiques et en forte croissance que l'on va réaliser les économies les plus pertinentes ?
Je ne le crois pas
Et je vous incite donc à nous rejoindre sur le groupe Facebook qui s'est constitué depuis hier, pour voir comment faire entendre nos arguments.
PS : je dois préciser, par souci de transparence, que MFG R&D, la société que je dirige, bénéficie de ce statut de JEI.
Quelques chiffres qui commencent à circuler :
RépondreSupprimerLe CIR, les chiffres :
+ 152 % :
C’est le pourcentage d’augmentation des embauches des jeunes docteurs généré par le CIR entre 2007 et 2008.
+142 % :
C’est le pourcentage de hausse des créations d’emplois en R&D dans les entreprises internationales implantées en France
+62 %
C’est le pourcentage en 2008 des entreprises qui n’avaient encore jamais utilisés le CIR parmi les 3 300 nouveaux bénéficiaires du CIR .
+ 48 %
C’est l’augmentation du nombre de PME bénéficiaires du CIR entre 2007 et 2008
+29 %
C’est l’augmentation du nombre de contrats enregistrés avec les PME par le CNRS en 2008 contre 3 à 4 % d’augmentation en moyenne les années précédentes
+20 %
C’est l’augmentation des dépenses d’investissements des entreprises dans les coopérations avec la recherche publique
Je suis créateur de startup, staut JEI. Je pense que la France continue une politique qui montre une fois de plus que seuls les grands groupes ont droit de citer.
RépondreSupprimerCe centralisme dirigiste est directement hérité des pratiques mises en place il y a 300 ans par Colbert et perpétué par De Gaulle après WWII.
Je regarde déjà vers les pays émergents pour trouver un point de chute pour ma boite d'ici deux ou trois ans, ils n'ont pas de JEI, mais je pense qu'ils ont le dynamisme et l'intelligence de ne pas scier à chaque fois la branche sur laquelle ils se trouvent.
Merci pour l'article
@ NoBrandApp
RépondreSupprimerMême stuation et même orientation. J'ai de bons contacts en Inde et en Île Maurice. Ce serait un comble, pour une boîte comme nous qui a eu des subventions Oséo, CFI, INPI et Scientipôle !